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La notation des fonctionnaires... vers la fin d'une tradition ?

juillet 2009

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Le système de notation est décrié. S'il reste obligatoire et très encadré sur le plan du droit dans la fonction publique territoriale, à titre expérimental, en revanche, dans les fonctions publiques d'État et hospitalière, au revoir la notation et bienvenue à l'entretien professionnel d'évaluation. Le gouvernement entend, à terme, généraliser ce nouveau système portant sur l'évaluation des résultats et les perspectives de carrière.

Les fonctionnaires (agents titulaires et non titulaires) sont évalués tout au long de leur carrière. Le principe de la notation s’appuie sur une note et une appréciation générale qui expriment la valeur professionnelle de l’agent.

LA NOTATION, CONTRAINTE RÉGLEMENTAIRE ET PERTE DE TEMPS ?

 

La notation comporte deux éléments qui doivent être cohérents entre eux :

  • une note chiffrée entre 0 et 20 ;
  • une appréciation littérale. Son objet est d’évaluer le travail effectué par l’agent à la fois quantitativement, qualitativement et son implication dans la structure au cours, en général, de l’année écoulée pour les fonctions publiques territoriale et hospitalière ou tous les deux ans, selon les administrations dans la fonction publique d’État.

La notation répond à une procédure qui doit être sécurisée juridiquement. Périodicité (annuelle ou bisannuelle), critères d'appréciation des agents, niveaux, marges d'évolution et modalités d'harmonisation préalable des notes sont fixés par les textes. C’est d’ailleurs ce qui alimente les critiques pour qui la notation chiffrée est trop scolaire.

La procédure se déroule en plusieurs étapes bien encadrées par la loi et la jurisprudence. Tout d’abord, le pouvoir de notation est exercé par le supérieur hiérarchique de l'agent. Très concrètement, une fiche de notation est établie par agent. Dans la FPT, la fiche comprend aussi les appréciations et les observations du « n+1 » sur les aptitudes de l'agent à exercer d'autres fonctions dans le même grade ou dans un grade supérieur et sur ses vœux concernant ses fonctions et ses éventuelles affectations. Ensuite, la fiche individuelle est communiquée, le plus souvent lors d'un entretien, par le supérieur à l'agent. Celui-ci peut y écrire des observations sur sa notation et sur ses vœux professionnels. Une fois signée, elle est rendue au supérieur. Bien sûr, l’agent peut aussi refuser – par écrit – de la signer en cas de désaccord.

DES FONCTIONNAIRES NOTÉS SOUS CONTRÔLE DU JUGE

L’agent, qui conteste sa notation, peut en demander la révision (de la note et/ou de l’appréciation) directement à son supérieur hiérarchique (recours gracieux). L’agent peut ainsi demander une révision en cas de baisse de note, de note en inadéquation avec l’appréciation ou encore lorsque celle-ci fait référence à ses opinions politiques, syndicales, son sexe ou son âge. L’agent peut également saisir la commission administrative paritaire (CAP) compétente (les CAP ont connaissance des fiches de notation de l'ensemble des agents), afin qu'elle propose la révision de sa notation à l'administration. Dans ce cas, la commission doit être en possession de tous les éléments utiles du dossier même si son avis n'a aucune force obligatoire et laisse à l'autorité l'entière liberté de modifier ou non la notation.

Toutefois, si l’avis de la CAP n’est pas suivi, celle-ci doit être informée des motifs qui ont conduit l’autorité à cette décision. Par exemple, pourrait ne pas suivre l’avis de la CAP, le maire face à un fonctionnaire qui, à l'occasion d'une demande en révision de sa note, se livre à des critiques sur le fonctionnement de la commune et dont le comportement (grave dans les propos et écrits) peut sembler contestable d'un point de vue déontologique. En effet, cette contestation doit se faire dans la limite de l'obligation de réserve dont le nonrespect peut entraîner une sanction disciplinaire.

Un recours juridictionnel, devant le tribunal administratif, peut aussi être formé contre la décision de notation (note et appréciation générale) dans les deux mois suivant le rejet explicite ou implicite du recours gracieux. Il existe d’ailleurs une jurisprudence assez abondante en la matière. Le juge exerce un contrôle dit « de l'erreur manifeste d'appréciation ». Il censure le décalage entre la valeur professionnelle de l'agent et les éléments objectifs portés à sa connaissance. Par exemple, concernant la FPT, le juge vérifie que l’autorité territoriale n’utilise pas de critères de notation supplémentaires à ceux fixés par les règlements. Ainsi, s’agissant des agents chargés de tâches d’exécution (catégorie C) seuls sont autorisés les critères portant sur :

  •  les connaissances professionnelles ;
  •  l’initiative, l’exécution, la rapidité, la finition ;
  •  le sens du travail en commun ;
  •  la ponctualité, l’assiduité.

En cas de contentieux, la notation est utilisée – surtout la partie « appréciation » – comme référence pour arbitrer les litiges entre l’agent et l’administration. Elle va apporter un éclairage sur la manière de servir et la relation au quotidien qu’a le fonctionnaire avec ses supérieurs. Il est donc important de ne pas négliger la procédure : en fixant des critères objectifs et transparents, en organisant un entretien avec l’agent concernant ses possibilités d’évolution et de formation…

Au-delà de la recherche de sécurisation des actes, la notation peut également être vue comme un outil de management.

ET LA CARRIÈRE DANS TOUT CELA ?

Reflet de la manière de travailler, la notation doit servir de référence lors de propositions annuelles d'avancement (de grade, d'échelon et promotion interne) en CAP. Elle permet également la fixation de certaines primes. Force est de constater qu'actuellement, son influence est assez faible mais le sujet est sensible et les organisations syndicales sont vigilantes (lors des CAP notamment...).  

Cela étant, depuis quelques années, la procédure tend à se moderniser pour devenir un véritable outil de management. Pour cela, la notation se voit complétée par un entretien dit « d'évaluation ». Le décret du 29 avril 2002 1 a notamment institutionnalisé la procédure d'évaluation des fonctionnaires.  

L’ENTRETIEN PROFESSIONNEL, NOUVEL INSTRUMENT DE MANAGEMENT PUBLIC

Là où la notation tend à comparer les agents entre eux, l’évaluation se concentre sur le travail de chacun et sur ses compétences. À partir de l’indispensable fiche de poste de l’agent et de la définition d’objectifs de service ou individuels, l'entretien va porter sur les résultats professionnels obtenus par l'agent. L’entretien d’évaluation va être aussi l’occasion d’évaluer les potentialités de l’agent, d'étudier ses besoins de formation (notamment au vu de ses missions), ses aspirations personnelles et perspectives d'évolution professionnelle. Elle va donc au-delà de l’appréciation de la manière de servir. Elle élargit le champ d’action de la notation et ouvre des perspectives plus diversifiées. Grâce à l’entretien, un dialogue entre les personnels d’encadrement et leurs collaborateurs s’instaure.

En pratique, l'agent peut, sur sa fiche de notation, avant de la signer, la compléter par des observations sur la conduite de l'entretien, sur ses perspectives de carrière et de mobilité et ses besoins de formation. Ceci est transmis pour visa à la hiérarchie et versé au dossier individuel de l'agent.

L’idée est qu’à partir du réalisé, la gestion des ressources humaines se projette dans l’avenir au travers de l’évolution de la carrière. On comprend donc pourquoi, bien que facultative, l’entretien d’évaluation est jugé plus dynamique et appelé à devenir la nouvelle règle.

EXPÉRIMENTATION EN COURS, LA RECONNAISSANCE DE L’ÉVALUATION COMME OUTIL DE PROMOTION

Tirant les conclusions des recommandations issues du rapport du comité d’enquête sur le coût et le rendement des services publics remis en février 2007, dans le cadre de la réforme de la FP, la loi du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique 2 permet d’expérimenter la suppression de la notation au profit des fonctionnaires de l’État et hospitaliers.

Les articles 58 et 59 de cette loi autorisent, en effet, les administrations étatiques et les établissements hospitaliers qui se portent volontaires, au titre des années 2007 à 2009, à se fonder sur des entretiens professionnels, et non sur la notation, pour apprécier la valeur professionnelle des agents. Deux innovations sont introduites par rapport à l’actuelle procédure d’évaluation :

  • l’institution au profit des agents d’un entretien professionnel annuel avec leur supérieur hiérarchique direct ;
  • le renforcement du lien entre cet entretien et les choix d’avancement et de promotion décidés par l’administration.

L’entretien professionnel devient donc un instrument de management à part entière. 

S’agissant des fonctionnaires de l’État, le décret n° 2007-1365 du 17 septembre 2007 3 précise les modalités d’application de la réforme. Concrètement, l’entretien est encadré et doit obligatoirement porter au moins sur :

  • les résultats professionnels obtenus par l’agent vu les objectifs qui lui ont été assignés, les conditions d'organisation et de fonctionnement du service dont il relève ;
  • les objectifs attribués pour l'année à venir et les perspectives d'amélioration des résultats professionnels de l’agent ;
  • la manière de servir de l’agent ;
  • les acquis de son expérience professionnelle ;
  • ses besoins de formation en tenant compte, notamment, des missions qui lui sont imparties, des compétences qu'il doit acquérir et des formations dont il a bénéficié ;
  • ses perspectives d'évolution professionnelle en termes de carrière et de mobilité.

L’entretien professionnel va donc être dans un premier temps, un temps de bilan mais aussi de discussion sur la manière de servir de l’agent, sur la fixation d’objectifs pour le service (en terme d’évolutions d’organisation, de fonctionnement…) et pour l’agent. Enfin, l’entretien va être l’occasion pour l’agent de s’interroger sur ses besoins de formation et ses souhaits professionnels.

Par arrêtés, les ministres intéressés peuvent aussi fixer d’autres thèmes sur lesquels peut porter l'entretien professionnel, en fonction de la nature des tâches confiées aux agents et du niveau de leurs responsabilités.

RECONNAISSANCE DE LA VALEUR PROFESSIONNELLE : MIEUX RÉCOMPENSER L’INVESTISSEMENT DES AGENTS

Dans un second temps, l’entretien professionnel a pour but d’aider à promouvoir ceux qui « s’investissent le mieux dans leur travail » selon le ministre du Budget, des Comptes publics, de la Fonction publique et de la Réforme de l’État, Éric Woerth.

Exprimée par le compte rendu de l’entretien, la valeur professionnelle est tout d’abord susceptible de donner lieu à l’attribution de réductions ou de majorations de la durée de service requise pour accéder d’un échelon à un autre. Ces « bonifications d’ancienneté » sont attribuées par le chef de service compétent aux agents qui se distinguent et leur répartition se fait après avis de la CAP compétente. Chaque ministère détermine aussi les quotas de réduction d’ancienneté et les modalités de répartition les mieux adaptés à son mode de gestion.

Ensuite, en ce qui concerne l’avancement de grade, le nouvel exercice d’appréciation de la valeur professionnelle des agents est mieux pris en compte. En effet, ce sont les comptes rendus d’entretiens professionnels qui servent pour l’établissement du tableau d’avancement. Il doit être procédé à un examen approfondi de la valeur professionnelle de l’agent compte tenu également : des propositions motivées formulées par les chefs de service, des notations antérieures à l’entrée en vigueur du décret. Les agents sont inscrits sur le tableau d’avancement par ordre de mérite. À noter toutefois, que les candidats dont le mérite est jugé égal, sont départagés par « l’ancienneté dans le grade » selon le décret 3 .

Enfin, lorsque des régimes indemnitaires prévoient une modulation en fonction de la manière de servir, celle-ci est appréciée par le chef de service au vu également du compte rendu de l'entretien professionnel. L’expérimentation a débuté dès l’année 2007, considérée comme année de référence pour la prise en compte de la valeur professionnelle. Dès le début 2008, des entretiens professionnels se sont donc déroulés. L’expérimentation menée pendant trois ans fera l’objet d’un rapport d'étape présenté chaque année aux partenaires sociaux et un bilan sera fourni au Parlement avant le 31 mars 2010. Cette simplification voulue par le président Nicolas Sarkozy dans son discours sur les réformes de la fonction publique, prononcé à l’Institut régional d’administration (IRA) de Nantes le 19 septembre 2007, constitue un outil de gestion des ressources humaines très important qui n’est pas sans lien avec le développement de la rémunération de la performance des fonctionnaires… L’idée également avancée est qu’un agent bien noté, bénéficiant d’une carrière accélérée, verra ses résultats récompensés sur le plan financier.

Sandrine BOTTEAU

Les notes sont, selon le ministère de la Fonction publique, « souvent concentrées entre 18 et 20, ce qui ne permet pas de distinguer les fonctionnaires les plus performants ». Trop scolaire ou réductrice, la notation est de plus en plus négligée au profit de l'évaluation jugée plus dynamique. Il s'agit de placer l'évaluation au c½ur du dispositif de reconnaissance des agents. 

1. Décret n° 2002-682 du 29 avril 2002 relatif aux conditions générales d'évaluation, de notation et d'avancement des fonctionnaires de l'État. 2. Loi n° 2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique. 3. Décret n° 2007-1365 du 17 septembre 2007 portant application de l'article 55 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique d'État.

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