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Enquêtes publiques, quelles évolutions suite à la loi du 12 juillet 2010 portant « engagement national pour l'environnement » dite Grenelle 2 ?

décembre 2010

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Les procédures d'enquêtes publiques ou d'impact sont souvent nécessaires pour les opérations techniques importantes.

Visant à informer le public, à recueillir, sur la base d'une présentation argumentée des enjeux, l'enquête publique formule des avis, des suggestions et d'éventuelles contre-propositions. Elle contribue également à élargir les éléments nécessaires à l'information du décideur et des autorités compétentes avant toute prise de décision.
L'enquête publique se définit aussi comme étant une procédure de consultation du public, préalable à la prise de certaines décisions administratives concernant des opérations d'aménagement ou de planification, des servitudes, et susceptibles de porter atteinte, entre autres, à des libertés, des droits fondamentaux (à titre d'exemple, le droit de propriété, le droit d'usage) ou des enjeux d'intérêt général comme celui de l'environnement.

Les enquêtes publiques doivent précéder la réalisation de certains projets à risques ou dangereux, ayant des impacts potentiellement importants sur l'environnement et la santé et/ou présentés comme d'intérêt public, tels qu'infrastructures de transports routiers, ou ferrées, aériennes, ainsi que carrières terrestres ou sous-marines, remembrements, installations classées pour la protection de l'environnement, certains travaux en rivière, estuaire ou sur le littoral, rejets d'eaux pluviales ou usées, stations d'épuration, forages d'irrigation, plans locaux d'urbanisme (PLU), plans de déplacements urbains (PDU), schémas de cohérence territoriale (SCOT), parcs naturels marins, parcs nationaux, parcs naturels régionaux, grands aménagements, grands projets (coût d'opération supérieur à 1,850 million d'euros), plans d'exposition au bruit (autour des grands aéroports), etc.

Elles permettent de donner un avis au décideur sur l'utilité du projet et la proportionnalité des mesures conservatoires et « restauratoires », ou compensatoires le cas échéant (pour mémoire, il existe - avant le Grenelle 2 - environ 180 types d'enquêtes).
L'étude d'impacts, quant à elle, est réalisée sous la responsabilité des pétitionnaires ou maîtres d'ouvrage (article R.122-1 du Code de l'environnement). Son contenu figure à l'article R.122-3 du Code de l'environnement :

  • décrit l'environnement dans lequel s'inscrit le projet ;
  • identifie, décrit et évalue les effets notables du projet sur l'environnement ;
  • présente les diverses solutions envisagées et les compare, notamment vis-à-vis de leurs effets sur l'environnement ;
  • justifie le projet retenu, notamment du point de vue de la protection de l'environnement ;
  • propose des mesures permettant d'éviter de réduire les impacts voire de compenser les impacts résiduels ;
  • produit un résumé non technique ;
  • donne le nom des auteurs ;
  • présente, le cas échéant, le programme dans lequel s'inscrivent l'opération et l'appréciation des impacts globaux.

Ces définitions de base évoquées appellent à préciser le contexte juridique actuel à savoir : le « Grenelle 2 » dont tout le monde parle.

En 2007, la concertation générale relative au Grenelle de l'environnement a abouti à la fin de l'année à la rédaction de 268 engagements dont la mise en œuvre se traduit par un important travail législatif et réglementaire.
Cette démarche s'est concrétisée par la rédaction de lois et de décrets, des mesures fiscales, des actions de communication et d'information, des feuilles de route ou plans (plan bâtiments, plan ville durable, plan de mobilisation pour les emplois et les métiers dans la croissance verte...), des conventions professionnelles...
Des lois de finances « grenellisées » (LFR 2008, LF et LFR 2009, LF 2010) ont été promulguées pour impulser notamment les comportements vertueux en créant de nouvelles aides et la loi « Grenelle 1 » du 23 juillet 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle est le premier pilier de ce travail collectif.
C'est donc dans ce même cadre que la loi « Grenelle 2 » promulguée le 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement modifie le régime des enquêtes publiques et des études d'impact.

Il convient dès lors de préciser quel dispositif prévalait en matière d'enquêtes publiques avant juillet 2010, pour mieux percevoir les modifications apportées par la loi Grenelle 2.

I - Les enquêtes publiques avant le Grenelle 2

1.     Le cadre réglementaire de l'enquête publique avant le Grenelle 2  

Si les dispositions de base remontent au début du XIXe siècle, ce n'est que depuis 1998 que le dispositif a pris de l'ampleur.  

De la garantie du droit de propriété... C'est une loi de 1810 qui pour la première fois a garanti le respect du droit de propriété lors des expropriations. Puis, celle du 7 juillet 1833 a introduit l'enquête préalable à la Déclaration d'utilité publique (ou DUP). Une réforme de 1959 a complété cette loi, mais toujours avec l'objectif de défendre le droit des propriétaires et valider les projets de l'administration. La loi du 12 juillet 1983 (dite loi Bouchardeau) relative à la démocratisation de l'enquête publique et à la protection de l'environnement a imposé que la procédure intègre un dispositif d'information et de recueil des avis de la population pour assurer que l'intérêt public et général soit mieux pris en compte.  

...au droit à l'information de l'usager Le volet environnemental des enquêtes tend à prendre de l'importance, notamment en raison de l'application obligatoire de la Convention d'Aarhus du 25 juin 1998 (accès du public à l'information en matière d'environnement), traduite dans la directive européenne 2001/42/CE du 27 juin 2001. Le décret n° 2009-496 du 30 avril 2009 relatif à l'autorité administrative de l'État compétente en matière d'environnement, prévue aux articles L.122-1 et 7 du Code de l'environnement, institue une supervision des avis des services de l'État par « l'autorité environnementale » rattachée au préfet de région.

2. Une procédure complexe aux nombreuses étapes  

Planification du projet par le pétitionnaire et/ou les autorités compétentes (maire, préfet, avec services concernés, aménagement du territoire, DDE, etc.).

Rédaction d'un dossier étayé de plans, cartes, arguments, éléments de «porté à connaissance», expertise écologique (qui devrait logiquement durer un an pour couvrir un cycle saisonnier complet), etc.

Saisine du tribunal administratif par le préfet et nomination d'un commissaire enquêteur choisi par le président du tribunal administratif dans une liste départementale d'aptitude à la fonction. En parallèle, transmission pour avis du dossier préalable à la déclaration d'utilité publique aux différents services de l'État concernés et/ou compétents (DASS, DREAL, DDT, etc.) et aux collectivités locales concernées (communes, conseil général, EPCI, etc.).

Suivant avis des services concernés, amendement du dossier.

Décision d'ouverture d'enquête (le plus souvent par arrêté préfectoral ou communal).

Publicité: annonce légale dans la presse locale (quinze jours au moins avant l'ouverture de l'enquête), affichage en mairie, en préfecture et sur le terrain (mêmes délais). L'annonce légale cite nommément l'autorité signataire, le commissaire enquêteur, l'objet de l'enquête, les dates de l'enquête, les dates, heures et lieux de consultation du dossier, les dates auxquelles le commissaire enquêteur peut recevoir le public, les conditions particulières permettant l'expression des différents avis, les possibilités de consulter le rapport du CE.

Consultation du public (durée fixée dans l'arrêté). Celui-ci peut se rendre dans les mairies où l'enquête est organisée, consulter le dossier et noter ses observations sur un registre mis à sa disposition (ou par courrier en mairie à son attention).

En outre, le commissaire enquêteur assure des permanences (trois à cinq en général) dans les mairies (cf. l'affichage et les avis dans la presse). Mise à disposition du dossier sur des sites Web dédiés.

À l'issue de l'enquête, après avoir recueilli auprès des autorités les informations qui lui semblent nécessaires, le commissaire enquêteur rédige son rapport qui relate le déroulement de l'enquête et analyse les observations reçues et ses conclusions dans lesquelles il émet son avis (qui n'est pas nécessairement celui de la majorité des déposants). Le commissaire enquêteur dispose en général d'un mois pour remettre son rapport et ses «conclusions motivées» à l'autorité qui a organisé l'enquête. Les conclusions doivent déboucher sur un avis personnel du commissaire enquêteur, avis qui sera «favorable», «favorable avec condition(s)» ou «défavorable». Rapport et conclusions sont rendus publics et consultables en préfecture et en mairie durant un an.

Décision: elle est prise par l'autorité, à partir des conclusions du commissaire enquêteur. Toutefois, l'autorité n'est pas tenue de suivre l'avis du commissaire enquêteur. S'il ne le fait pas, les arguments et l'avis du commissaire enquêteur pourront toutefois être utilisés par le tribunal administratif s'il est saisi contre le projet. Réalisation ou non du projet.  

II - Les (r)évolutions issues du Grenelle 2 en matière d'enquêtes publiques

1.     Une réduction drastique des différents types d'enquêtes    

Les articles 236 à 245 de la loi Grenelle 2 réduisent de manière importante les types d'enquête publique qui passent ainsi de 180 à 2 (une pour l'expropriation et une au titre de la protection de l'environnement).  

Doivent faire l'objet d'une enquête publique : - tous les projets soumis à étude d'impact ; - tous les schémas, plans, programmes du Code de l'environnement et du Code de l'urbanisme qui prévoient une enquête publique ; - les principaux projets du Livre III du Code de l'environnement : création d'un parc national, d'un PNR, les projets de sites inscrits ou classés, de réserves naturelles.  

Des exceptions existent tout de même : - les ZAC ; - les projets de caractère temporaire ou de faible importance (liste établie par décret) ; - les travaux et ouvrages exécutés en vue de prévenir un danger grave ou immédiat ; - les travaux, constructions, aménagements et ouvrages militaires déterminés par décret.  

La loi Grenelle 2 introduit la possibilité de réaliser une enquête publique unique lorsque le projet, plan ou programme, est soumis à l'organisation de plusieurs enquêtes prévues par différentes législations, dont l'une au moins relève du Code de l'environnement.  

Elle définit des possibilités de modifier le dossier soumis à enquête publique : - pendant l'enquête : possibilité de suspension de l'enquête publique durant six mois en vue d'apporter des modifications substantielles au dossier soumis à enquête publique ; - après l'enquête : en cas de changements modifiant l'économie générale du projet, organisation d'une enquête publique complémentaire portant sur les avantages et les inconvénients de ces modifications pour le projet et pour l'environnement.   Elle confirme la pratique qui consistait en cas de conclusions défavorables du commissaire enquêteur pour un projet pour l'organe délibérant de prendre une délibération motivée réitérant la demande d'autorisation.  

2.     Examen « au cas par cas » et demande d'avis par le pétitionnaire : une personnalisation de l'enquête publique ?  

Les modifications apportées par les articles 230 à 235 de la loi Grenelle 2 aux études d'impact offrent deux nouvelles dispositions :   Un examen au cas par cas Cette première nouveauté introduite par le Grenelle 2 pour les études d'impact permet dorénavant, que les projets soumis à étude d'impact soient non seulement définis par voie réglementaire, mais également « au cas par cas » par l'autorité administrative compétente en matière d'environnement. L'élaboration du dossier peut désormais être partagée.  

Une intervention possible du pétitionnaire dans la procédure Le pétitionnaire peut désormais non seulement demander un avis à l'autorité compétente pour prendre la décision avant de déposer sa demande (cet avis ne préjuge pas de la décision finale), et aussi la solliciter pour l'organisation d'une réunion de concertation préalable avec les parties prenantes locales intéressées afin qu'elles puissent faire part de leurs observations sur l'impact potentiel du projet envisagé  

Le champ de l'étude d'impact est étendu à l'analyse des effets cumulés « avec d'autres projets connus » et envisagée de manière plus large.  

La description des variantes au projet retenu est étendue : « esquisse des principales solutions de substitution qui ont été examinées par le pétitionnaire ».  

Un mécanisme de sanction administrative est institué :

  • en cas de non-respect des mesures compensatoires figurant dans l'étude d'impact, l'autorité responsable de la décision peut mettre en demeure le pétitionnaire ;
  • en cas de non-respect du délai imparti, elle peut l'obliger à consigner une somme correspondant au coût des mesures à réaliser ;
  • passé un nouveau délai imparti, la somme en question est utilisée par l'État ou la commune pour réaliser les mesures en question en lieu et place de l'intéressé.    

  

Laurent Martin 

En savoir plus  

http://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjl08-155.html  

http://www.developpement-durable.gouv.fr/  

http://www.legrenelle-environnement.fr

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