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L’attractivité des concours de la Fonction publique en 2024

juin 2024

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Dans un contexte où la fonction publique fait face, à la fois, à une pénurie de compétences dans certains domaines, et à une perte d’attractivité des métiers, la tendance – exception faite des concours de catégorie A+ - est à la baisse du nombre de candidats inscrits aux concours et examens professionnels. Ce mode de recrutement, longtemps considéré comme la « voie royale » pour rejoindre la fonction publique, est mis à mal. Pour lutter contre ce phénomène, Gouvernement et acteurs du secteur public élaborent des pistes concrètes.

Les trois versants de la fonction publique sont touchés par la perte d’attractivité

En France, trois grands principes fondent la fonction publique : le principe d'indépendance du fonctionnaire (système dit de la « carrière »), celui de responsabilité et le principe d'égalité. Par référence à l'article 6 de la Déclaration des doits de l'homme et du citoyen de 1789 qui dispose que l'on accède aux emplois publics sur la base de l'appréciation « des vertus et des talents », le recrutement se fait, en principe, par concours d’entrée - dans un corps ou un cadre d’emploi (externe, interne ou troisième voie) - qui cherche à évaluer les compétences des candidats à travers des épreuves écrites et/ou orales, dont l’évaluation est confiée à un jury (article 16 du statut général des fonctionnaires – article L.320-1 du code général de la fonction publique).

Le Sénat relevait en 2019 que « le concours donnant accès à des corps ou cadres d’emplois est un processus de recrutement long et coûteux » au « détriment parfois de l’adaptation aux besoins immédiats des administrations et des usagers des services publics » (Projet de loi de finances pour 2020 : Fonction publique).

Depuis le milieu des années 1990, « le nombre moyen de candidats pour un poste offert étant passé de 16 en 1997 à six aujourd'hui ». Le rapport annuel 2023 sur l'état de la fonction publique note un nombre d’inscriptions (473 000) en hausse de 8,2 % en 2021 par rapport à 2020, après une baisse de 10,6 %. Mais un candidat inscrit sur deux ne s’est pas présenté aux épreuves.

Ce constat est d’autant plus préoccupant que ce recul de candidats au concours touche la plupart des concours des trois versants de la fonction publique (État : ministères, territoriale : collectivités territoriales - communes, départements, régions et leurs établissements - et hospitalière : établissements de santé). Une baisse quasi continue depuis 2005 :

  • S’agissant de la FPE, en 2021, si le nombre d’inscrits est globalement en hausse, il est en baisse pour les concours de catégorie B (– 4,3 %) et le nombre de candidats présents aux épreuves de concours de catégorie A et de catégorie B est également en recul de respectivement 4,5 % et 9,2 % ;  
  • Dans la Territoriale, le nombre de candidats présents aux concours organisés par les centres de gestion (CDG) a chuté de près de 33% entre 2014 et 2017. En 2022, près d’un candidat sur deux admis à concourir ne s’est pas présenté à l’écrit dans la FPT ;
  • Dans la fonction publique hospitalière (FPH), le concours d'attaché d'administration hospitalière illustre les difficultés rencontrées par les hôpitaux : le nombre de candidats présents a chuté de 18% entre 2014 et 2017 selon le rapport du Sénat, alors que le nombre de postes à pourvoir augmentait.

En 2020, une large majorité (55 %) des jeunes diplômés de 2017 n’envisageait pas d’intégrer la fonction publique au cours de leur carrière, selon une étude de la DGAFP, la Direction générale de l’administration, publiée en février 2023. Les jeunes candidats peuvent trouver le concours et la préparation associée chronophages, peu attractifs, et ne mesurant que la capacité à répondre aux exigences du concours plutôt que de démontrer les compétences que le concours cherche à mesurer (cf. OCDE, 2023). 

D’ailleurs, dans un manifeste paru le 7 mai 2024, élaboré par la plateforme Profil public, en partenariat avec l'association la Cordée, de jeunes candidats ou en emploi dans la fonction publique jugeaient les épreuves des concours « trop académiques », « aux formats peu adaptés à l’évaluation des compétences de demain ». 

Mathématiquement, et à nombre de concours quasi-stable sur la même période, cela se concrétise par un taux de sélectivité en baisse depuis plus de 10 ans. A titre d’exemple, depuis 2007, la sélectivité a été divisée par deux aux concours externes de la FPE, passant de 12 en 2007 à 5,6 en 2021.

Dans le cadre de la concertation relative à l'attractivité des métiers et des concours de la fonction publique, la question du renforcement de l’attractivité des concours et de l’accès à la fonction publique constitue dès lors le premier axe de travail. 

Faciliter l’accès aux emplois publics, et concentrer le processus de concours sur les compétences 

En avril dernier, Stanislas Guerini, le ministre chargé de la fonction publique, indiquait vouloir redonner du sens aux concours d’entrée dans la fonction publique qui sont aujourd'hui « un peu déconnectés de la réalité des métiers », en leur donnant « une logique professionnalisante » renforcée et adaptée sans en réduire le niveau d’exigence. 

Dans certaines professions notamment les plus hautement qualifiées (exemple dans le domaine de la transition numérique), il existe des besoins spécifiques pour lesquels il est difficile de trouver des profils adaptés, soit que les corps et cadres d'emplois dans le public n'offrent pas suffisamment de postes ouverts, soit que ceux-ci subissent la concurrence du marché de l'emploi privé.

Dans le secteur privé, les modes de recrutement sont variés (sur CV, à partir d'un dossier, après un ou plusieurs entretiens, tests, mises en situation…) et surtout, essentiellement tournés vers la valorisation des compétences et des talents des candidats, plus que sur leurs connaissances académiques. La FP doit s’adapter. Une meilleure prise en compte des expériences antérieures dans les épreuves des concours est donc nécessaire.

La professionnalisation des épreuves (cas pratique à partir d'un dossier portant sur une politique publique), les épreuves collectives de mise en situation ou le développement des concours sur titres, déjà répandus dans la fonction publique hospitalière, ont déjà permis de diversifier les profils des candidats. Depuis la loi du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique, il est possible d’introduire une épreuve de reconnaissance des acquis de l’expérience professionnelle (RAEP) dans les concours de la fonction publique et ainsi de faire valoir les compétences acquises. Cette professionnalisation est donc appelée à se poursuivre.

Elle pourrait également porter sur la rationalisation du nombre d’épreuves des concours (concours sur titre). Une piste que bon nombre d’organisations syndicales reçoivent favorablement notamment pour recruter infirmières et assistantes sociales ou bien d’autres métiers du sanitaire et social en tension.

Moderniser l'organisation des concours 

D’autres pistes de réflexion pour rendre plus attractifs les concours sont évoquées comme la simplification des démarches, ou encore, la pérennisation des dispositifs mis en place lors de la crise sanitaire du Covid-19 tels que la transmission dématérialisée des pièces et documents nécessaires pour concourir ou bien encore, le recours à la visioconférence lors du déroulement des concours. 

Par ailleurs, lorsque la déconcentration des recrutements n’est ni possible ni pertinente, la DGAFP et plus récemment, l’OCDE recommandent le développement des concours nationaux à affectation locale. Le décret du 13 février 2020 pris en application de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique précisant les conditions et les critères permettant d'organiser des concours nationaux à affectation locale s’inscrit dans cet axe. 

Enfin, le rapport du Sénat sur le projet de loi de finances 2020 préconise d'optimiser les conditions d’organisation des concours. Pour une meilleure visibilité des concours, le rapport propose que soit publié de façon centralisée le calendrier des concours des trois versants de la fonction publique, par exemple sur le site Place de l’emploi public (devenu en 2022, la plateforme « choisir le service public » - ndlr). La première proposition du manifeste de la Plateforme Profilpublic est d’ailleurs, de « centraliser les infos concours sur un canal unique » comme Choisir le service public et décrypter les concours sur les réseaux sociaux afin de toucher les jeunes. 

Tout en conservant les valeurs d’équité de la fonction publique

Renforcer l’attractivité et l’efficacité des concours de la fonction publique, c’est aussi « donner à voir la richesse des métiers, la diversité des opportunités professionnelles » au sein des 3 versants de la fonction publique, de « montrer l’exemple dans les territoires : contribuer à une insertion professionnelle des jeunes et des personnes peu qualifiées, valoriser la compétence, l'engagement, garantir l'égalité entre les femmes et les hommes, et lutter contre toutes les formes de discriminations » écrit le gouvernement sur le sujet de la transformation de la fonction publique.

Pour la DGAFP, en amont, il conviendrait de « favoriser la préparation aux concours » : mise en place de nouvelles classes préparatoires intégrées (CPI), de dispositifs destinés à aider les étudiants ou demandeurs d'emploi de condition modeste, à préparer les concours. Le manifeste soutient que les Prépas Talents sont un dispositif intéressant « pour briser les plafonds de verre » mais peu connu. 16% des répondants n’ont jamais entendu parler des prépas talents (cf. proposition n°5). 

Une piste reprise par l’OCDE en 2023, qui recommande à la France de renforcer les outils similaires aux « Prépas talents » afin d’encourager les candidatures de jeunes candidats issus de milieux modestes et de développer l’accompagnement des contractuels, apprentis, stagiaires mais aussi fonctionnaires à fort potentiel pour passer un concours, et l’utilisation de la gamme complète des possibilités de la loi du 6 août 2019. 

Une autre piste serait de développer « le coaching ». Si des initiatives existent, elles ne sont pas institutionnalisées. Il serait intéressant de formaliser un tel dispositif afin de mettre en relation les candidats admissibles avec des coachs (anciens élèves, agents publics en poste…) pour bénéficier d’oraux blancs (cf. proposition n°6 du manifeste). 

Réévaluer la place du concours ? 

C’est en fait, toute la place du concours dans l’accès aux emplois publics qui est en train d’être réévaluée. Le concours comme outil de sélection des candidats à la fonction publique voit son utilisation être redéfinie : dans quel contexte l’utiliser ? à quelle échelle géographique ? pour évaluer quelles compétences ?

S'agissant de la haute fonction publique, le rapport de la mission Thiriez, publié en 2020, a suggéré de nouvelles modalités de recrutement dans les grandes écoles. Si le principe du concours n'est pas remis en cause, le document envisageait de modifier les épreuves pour « étudiant » (suppression de la culture générale, par exemple) et de simplifier les différents concours (création d'un concours interne unique, mutualisation des épreuves communes...). Prolongeant l'ordonnance du 3 mars 2021 favorisant l'égalité des chances pour l'accès à certaines écoles de service public, une ordonnance du 2 juin 2021 réforme l'encadrement supérieur de la fonction publique de l'État en matière de formation et de déroulement de carrière. Elle crée notamment l'Institut national du service public (INSP) dont l'un des objectifs est de recruter « des profils socialement, géographiquement et académiquement plus divers ». Il s’agit de : 

  • refondre ses voies d'accès après avoir évalué ses cinq concours d'entrée actuels (concours externe, interne, troisième concours, concours « Docteurs » et « Talents » ) ;
  • revoir les épreuves écrites et orales de ces concours. Les oraux se recentrent aujourd’hui, sur « l'examen des capacités et du potentiel des candidats, au-delà du contrôle des connaissances ».

Enfin, la dynamique amorcée en 2023, s’oriente vers un renforcement du rôle de l’apprentissage. S’agissant de la Territoriale, le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) a lancé en janvier une campagne d'intentions de recrutement des apprentis auprès des collectivités. Plus de 4 000 collectivités ont exprimé leur intention de recruter plus de 21 000 contrats d’apprentis. 

« Demain, un apprenti qui aura été formé dans une administration sera intégrable à la fonction publique à l’issue de son alternance » a confirmé Stanislas Guerini lors de son interview en avril. Une manière de mettre à profit les efforts investis dans l’apprentissage, qui, s’ils sont suivis de moyens pour fidéliser les apprentis – potentiellement à travers un accompagnement vers le passage d’un concours – permettra de développer des « viviers » locaux et/ou mobiles.  

À cela s’ajoute la démocratisation du recours aux contractuels, qui eux-mêmes dépendent de processus de recrutement différenciés, devant permettre de répondre à des problématiques différentes (ex. possibilité depuis la loi du 6 aout 2019 d'embaucher des contractuels sur des emplois de direction (en CDD) ou des contrats de projet afin de mener à bien un projet ou une opération spécifique, en CDD de un à six ans). 

Si le concours est la voie « normale » d'entrée dans la fonction publique, les nouvelles pistes s’annoncent prometteuses, destinées à une utilisation plus stratégique au service du recrutement public …Mais elles restent maintenant à confirmer par un calendrier et un plan d’action détaillé ! 

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